Pour un 1er mai 2020 révolutionnaire et libertaire !

En cette période de confinement, synonyme de restrictions des libertés individuelles, imposées par l’état comme unique solution pour endiguer la pandémie du COVID-19, il est primordial de rappeler en ce 1er mai l’importance de la lutte internationale contre la pire des pandémies qui gangrène notre monde : le capitalisme hétéro-patriarcal.

Il est bon de rappeler que contrairement à ce que son nom indique, cette journée du 1er mai ne consiste pas à « fêter le travail » à proprement parler mais plutôt à honorer les travailleur.euse.s qui ont lutté à travers l’histoire pour arracher au capital de nombreux acquis sociaux tels que la journée des 8 heures, les congés payés, la semaine des 40 heures.

Ces victoires historiques sont des étapes décisives de la lutte menée par le prolétariat contre le capital; lutte qui devra mener finalement à l’abolition de la condition salariée des travailleur.euse.s, c’est à dire à l’auto-abolition du prolétariat.

Qu’elle soit interdite ou fériée, cette journée de lutte internationale du 1er mai trouve son origine dans le mouvement anarchiste, ce qui lui confère une véritable quête d’émancipation et de liberté. En cette journée, revenons sur deux 1er mai historiques illustrant cette quête libertaire avant de définir où nos forces devraient se concentrer à la suite de ce 1er mai 2020.

1er Mai 1886 : l’origine et le syndicalisme ouvrier américain

Parmi les nombreux événements de l’histoire de cette journée, comment ne pas rappeler celui qui en est à l’origine :  le 1er mai 1886, 340.000 salariés paralysent près de 12.000 usines à travers les États-Unis afin d’obtenir la journée de huit heures.  

Cette revendication est née deux années plut tôt et ce, pour la première fois dans l’histoire du mouvement ouvrier : réuni.e.s en syndicat lors du congrès de l’American Federation of Labour de 1884, les travailleur.euse.s décident d’instaurer le 1er mai comme jour de manifestation afin d’aboutir à la journée des huit heures.

Arrive le 1er mai 1886. Un grand nombre de travailleurs ont obtenu immédiatement satisfaction grâce à une forte pression des syndicats. Mais d’autres, moins chanceux,  environ 340 000 travailleur.euse.s, décident de faire grève pour forcer leur employeur à céder. Le mouvement de révolte et de grève se poursuit les jours suivants. Le 3 mai à Chicago, la répression de la police cause 3 morts parmi les grévistes. Le lendemain, les travailleur.euse.s  organisent une marche de protestation durant laquelle explose une bombe faisant 15 morts dans les rangs de la police.
Le 11 novembre 1886, cinq anarchistes sont pendus alors que les preuves de leurs implications sont incertaines. D’emblée, une évidence s’impose : ce procès est moins celui de ces hommes-là que celui du mouvement ouvrier en général et de l’anarchisme en particulier.
Quelques années plus tard, la preuve que l’attentat fut fomenté par la police réhabilitera l’innocence des anarchistes. C’est de cette événement que naîtra la tradition révolutionnaire de célébrer la journée internationale des travailleur.euse.s lors du 1er mai. 

Gravure de 1886 parue dans le journal Harper’s Weekly représentant le drame de Haymarket Square.

1er Mai 1936 : le féminisme libertaire en Espagne

Parmi les 1er mai qui s’en suivirent, il est important de rappeler celui de la création du premier numéro de la revue « Mujeres Libre » qui illustre la portée féministe libertaire de cette date. 
La revue constitue l’organe et le porte-parole des militantes anarchistes féminines espagnoles et de leur mouvement d’émancipation Mujeres Libres. Active durant la révolution sociale espagnole de 1936, Mujeres Libres est la première organisation féministe autonome prolétarienne en Espagne.
Formée majoritairement de femmes issues des classes ouvrières (jusqu’à 20.000 adhérentes en juillet 1937), son but est de mettre fin à ce qu’elles nomment « le triple esclavage auquel les femmes ont été soumises et continuent à être soumises : esclavage de l’ignorance, esclavage en tant que femme et esclavage en tant que productrice ».

Pour surmonter les obstacles de l’ignorance et de l’inexpérience qui leur étaient imposés, elles mettent en place entre autres des campagnes d’alphabétisation et des cours de formations techniques, professionnelles et politiques destinés aux femmes. Dans le même temps, elles participent activement à la lutte contre l’ennemi franquiste en mettant sur pied des cliniques, en participant à la formation des infirmières et miliciennes et en organisant collectivement la production alimentaire pour les milices révolutionnaires.
Défendant l’émancipation des femmes et leur participation à la lutte révolutionnaire, elles s’opposèrent au « féminisme libérale » et se réclamèrent d’un « féminisme prolétarien » prônant l’égalité des femmes tout en contestant les rapports de domination de classes.

Elles combattront la domination des hommes au sein même du mouvement libertaire et participeront au développement du féminisme révolutionnaire et libertaire.La revue née le 1er mai 1936, deux mois avant que n’éclate la révolution, animera l’Espagne libertaire d’un féminisme révolutionnaire par la qualité de ses textes et ce, jusqu’à la défaite d’octobre 1938 face aux franquistes.

En nous réclamant de la tradition des « Mujeres Libres », nous soulignons que le 1er Mai est aussi une journée de combat féministe! Nous ne luttons pas seulement pour l’abolition du salariat, mais également pour la fin de la division du travail entre la sphère publique et la sphère « privée ». Il s’agit d’une division qui s’est développée avec le capitalisme et qui dévalorise systématiquement et ne reconnaît aucun travail non- réalisés sous les conditions du travail salarial, travail majoritairement imposé aux femmes. À bas le capitalisme patriarcal!

Images de l’exposition ‘Mujeres Libres (1936-1939), precursoras de un mundo nuevo’ – Photo el diario.es

1er Mai 2020 : la santé en lutte.

Après 2 mois de confinement, nous appelons à ce que ce 1er mai 2020 constitue le début d’un dé-confinement révolutionnaire et libertaire luttant contre le capitalisme et ses systèmes d’oppression associés (hétéro-patriarcal, raciste, validiste, fasciste, coloniale, écocide). Dans ce sens, une fois la pandémie vaincue, il sera indispensable de créer des rapports de force avec la véritable maladie que constitue le capitalisme ainsi que son meilleur ami : l’Etat.


Partant de la crise sanitaire actuelle, il existe un potentiel de révolte émergeant d’une convergence des luttes autour du problème de la santé publique qui n’a jamais été mis autant sous les feux des projecteurs depuis longtemps. L’état a perdu le contrôle de la situation et les conséquences des coupes budgétaires des 10 dernières années sont une évidence aux yeux de chacun.e.

Les scandales du secteur de la santé ne doivent pas nous faire oublier les luttes menées ailleurs.Des grèves ont eu lieu dans le secteur des transports et dans plusieurs enseignes de commerce.Cette période de confinement aura mis également en évidence l’importance des emplois les moins valorisés et pourtant vitaux. D’autre part, la crise sanitaire a poussé encore un peu plus les personnes précaires vers la misère. Nous ne pouvons pas non plus ne pas citer les différentes initiatives de solidarité qui sont nées spontanément depuis la base, telles que les brigades de solidarité populaire. Ces mouvements auto-organisés pallient les carences de l’Etat en fabriquant des masques et en distribuant des vivres aux plus démuni.es. Ils mettent en avant l’importance de l’autonomie collective comme outil d’émancipation et de lutte. Leur émergence spontanée en cette période de crise sont la confirmation de la justesse de notre projet de société communiste libertaire. 

Dans cette perspective d’ensemble, les événements du 1er mai 1886 et du 1er mai 1936 servent de source d’inspiration. L’un comme l’autre démontre la nécessité à l’auto-organisation, le besoin de créer un rapport de force autour d’une lutte commune ainsi que l’importance stratégique de partager collectivement des revendications majeures comme le furent la journée des 8 heures en 1886 ou l’accès à l’alphabétisation pour les féministes en 1936.

Dans la lignée des mouvements de nos ancêtres, la lutte pour la santé constitue une de ces revendications majeures qui ne peut qu’entraîner à la convergence des luttes sociales de ce moment. En effet, elle unit dans son combat autant ses travailleur.euse.s que ses usagers. De plus elle n’est pas limitée à une lutte pour de meilleures conditions de travail puisqu’elle englobe des enjeux anti-sexistes et anti-racistes.
En effet, le secteur de la santé repose majoritairement sur une main d’œuvre féminine et racisée.  Ainsi,  la lutte pour la santé mène directement à la mise en question de la division du travail sexiste et raciste dans le capitalisme. Sans aucun doute, la lutte des classes sera une lutte intersectionnelle qui met en question toutes les divisions capitalistes; dans le cas contraire, elle ne sera pas!

Dès lors, l’heure est au regroupement et à la préparation de la lutte en vue des prochains mois. Dans ce sens, nous soutenons et nous nous engageons avec force et détermination dans le mouvement auto-organisé « la santé en lutte » composé de travailleur.euse.s du secteur de la santé qui luttent collectivement pour la mise en place d’un système de santé basé sur l’humain plutôt que sur la rentabilité financière. 

Le 1er mai 2020 sonne l’heure de la création d’un mouvement populaire qui appuie la lutte menée par le personnel soignant.

Faisons que 2020 rentre parmi les dates marquantes de l’histoire des luttes internationales !


La santé en lutte
Grande manifestation de la santé
Brigades de solidarité populaire bruxelles

Front Syndicaliste Libertaire d’UCL.

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