Un rassemblement face à un meurtre dans notre communauté est, et doit être politique

Plusieurs d’entre nous avaient alors décidé de participer au rassemblement organisé par la Rainbow House et ses membres. Nous souhaitions aussi en faire un retour, qui a tardé, au point où nous nous sommes demandé si ce n’était pas « un peu tard pour en parler ».

Finalement, cela nous a paru primordial de refuser cet instinct de prescription. C’est au contraire en continuant d’en parler qu’on fait vivre la mémoire et qu’on empêche l’Histoire d’oublier les noms de nos mort·e·s.

Il est politique de rappeler que rien n’est anodin dans les histoires de meurtres, que l’homophobie et la transphobie ont tué et continuent de tuer.

Un de nos camarades qui était au dit rassemblement s’était accompagné d’une pancarte « Justice et Police complices ».

Justice et Police complices

En effet, la justice a remis en question le caractère homophobe du meurtre, pourtant objectivement apparent : les suspects avaient déjà au moins commis deux autres agressions sur des homosexuels et étaient donc connus de la police. Il nous paraît donc clair que ces deux institutions ont à nouveau une responsabilité face à nos mort·e·s.

Très rapidement, la personne s’est vu refuser l’entrée par les organisateurs ainsi que par la police elle-même, ceux-ci lui expliquant que « le rassemblement n’était pas politique ».

Nous refusons cette position, et affirmons le contraire : tout, dans un rassemblement face à un meurtre dans notre communauté est, et doit être politique.

Nous voyons en cela une récupération, habituelle des violences subies par nos communautés , de la part des institutions, et nous la dénonçons. Si nous respectons le deuil de la famille et lui exprimons tout notre soutien, cela n’enlève en rien la nécessité de politiser ce type d’événement, qui ne nous est pas étranger.

C’est notre droit et devoir de nous emparer de ce drame pour l’inscrire dans la continuité de l’histoire Queer, car celle-ci est aussi l’histoire des membres de nos communautés oppressées, marginalisées, et tuées.

Il est primordial de crier haut et fort que

SI, ce meurtre est homophobe !

Qu’il n’est pas négligeable que la police connaissait les suspects pour d’autres agressions homophobes mais que le meurtre ait tout de même été commis.

Que le meurtre d’une personne LGBT dans une commune qui vote à 55% pour la n-va et le vlaams belang n’est pas un simple détail.

Qu’il n’est pas anodin non plus que cet assassinat ait eu lieu lors d’une pandémie où nos habituels lieux de rencontre entre personnes Queer nous ont été arrachés, nous poussant alors à nous donner rendez-vous dans des endroits non sûrs, comme le parc où a été tué David Polfiet.

Nous refusons que les institutions parlent à notre place de manière dépolitisée, et nous ne voulons plus leur en laisser l’occasion.

Nous voulons également remarquer qu’une indignation collective est généralement facilitée lorsqu’il s’agit de faire face au meurtre d’un homme cis ; la politisation de sa mémoire ne doit pas écraser celle de tous.x.tes nos autres mortes trans, gouines, TDS, racisé·e·s, précaires, et ne doit pas favoriser la seule libération de la parole masculine.

Notons, enfin, que cela fait à peine un mois que ce crime a été commis et déjà, nous n’en entendons plus parler.

Le silence est meurtrier en ce qu’il protège et contribue à cette justice hétéropatriarcale dont nous ne voulons plus.

Nous agirons pour que cela cesse et que nos rassemblements soient fiers d’être politiques.

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