Les sources de l’hétéronomie

Par Julien Clamence

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J’ai eu l’occasion, dans un précédant billet, de présenter rapidement la pensée de Cornélius Castoriadis et plus spécifiquement son projet d’autonomie. L’autonomie est pour lui l’émancipation individuelle et collective, la capacité de l’individu de construire son univers social et politique avec les autres. Or, Castoriadis a aussi beaucoup théorisé les causes de l’hétéronomie, l’état ayant dominé l’espèce humaine pendant presque toute son histoire. L’hétéronomie relève de toutes les formes de dépendances des individus à des institutions héritées et imposées ; elle signifie aussi l’incapacité des acteurs politiques à mettre en question la société, à détruire les formes sociales aliénantes et à en fonder de nouvelles, plus émancipatrices. Intéressons-nous cette fois aux sources de l’hétéronomie.

Castoriadis évoque explicitement deux grandes sources : la privatisation des individus et la bureaucratisation des organisations politiques et économiques. Les deux se nourrissent l’une l’autre ; la privatisation permet à la bureaucratie d’asseoir son hégémonie structurelle et la bureaucratie renforce le sentiment d’impuissance qui conduit au retrait des individus dans leur sphère privée, leur oïkos. Castoriadis dénonce également une l’apathie politique, liée aux deux phénomènes précédents, mais qui s’exprime plutôt en une forme de crétinisation de la société. Ce concept parcourt son œuvre en filigrane. Les sociétés occidentales, fortes d’un savoir millénaire et des révolutions scientifiques et philosophiques des siècles derniers s’enfonceraient dans une reproduction de la bêtise comme moyen de contrôle des peuples. Le philosophe peut ainsi dire, je paraphrase : agir c’est éteindre la télévision ; on acquiert sa liberté en agissant et non en consommant, en étant actif et non passif.

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