par Gary Docquié (AL Bruxelles)
Les fermetures d’usines et les plans sociaux se multiplient en France, mais la crise touche aussi les autres pays d’Europe. Retour sur le cas d’ArcelorMittal en Belgique.
En octobre 2011, ArcelorMittal annonçait la fermeture de la « phase à chaud » du laminage de l’acier à Liège, qui doit occasionner la perte de 800 emplois. La décision marque les esprits, 40 000 personnes, un chiffre énorme pour Liège, s’y rassemblent en décembre. La Fédération générale du travail de Belgique (FGTB) et la Confédération des syndicats chrétiens (CSC) optent pour une stratégie de négociation, réclamant des primes et le maintien de la « phase à froid ».
Liquidation de la sidérurgie liégoise
Les patrons sont voraces et proposent des primes de licenciement bien insuffisantes. Une étude montre que ArcelorMittal a engrangé des milliards depuis 2008 et payé moins de 500 euros d’impôts. En novembre 2012, les travailleurs et travailleuses de la phase à chaud réuni-e-s en assemblée générale rejettent unilatéralement les propositions de la direction. Ceux et celles de la phases à froid solidaires suivent le mouvement. L’exaspération monte, les salarié-e-s jettent des bobines d’acier dans le fleuve. Beaucoup savent qu’après la fermeture de la phase à chaud, la fermeture intégrale de la sidérurgie à Liège n’est plus qu’une question de temps.
Il n’aura pas fallu attendre longtemps : en janvier est annoncée la fin de la phase à froid. 1 300 salarié-e-s sont directement concerné-e-s. Avec plus de 2 000 personnes au chômage, c’est la mort sociale pour toute la région : l’indignation est totale, bien au-delà des métallos.
Malgré une assemblée houleuse où la direction syndicale casse la détermination de nombreux salarié-e-s, la lutte reprend. Cette fois, la colère gronde : le 29 janvier 2013, en route pour manifester devant le gouvernement wallon, 1500 métallos et soutiens se font bloquer par la police. Explosion immédiate, les boulons et la peinture pleuvent, la police riposte. Cette dernière s’était préparée : la police anversoise néerlandophone avait été dépêchée pour monter la garde du gouvernement wallon, l’Elysette, dans la petite ville de Namur… Le 6 février à Strasbourg, les métallos belges et français sont côte à côte pour résister au géant mondial. La police française imite les belges, un ouvrier perd un œil sous un tir de flashball.
Objectif maintien de l’emploi
Pour les travailleurs et les travailleuses, le maintien de leur emploi reste l’objectif numéro un. Syndicats et politiques explorent les pistes. Le PS, au pouvoir en Wallonie, est cependant de moins en moins un allié pour la FGTB, syndicat majoritaire chez les métallos. Là où le PS souhaite un repreneur, le syndicat souhaite une « régionalisation » avec mise sur la table d’argent public. Mais les travailleurs ne sont pas dupes : mettre l’entreprise sous contrôle de ceux qui leur envoient la police et souhaitent un repreneur privé qui jouera au même jeu que Mittal dans 10 ans, est une option qui ne tient pas la route…
La sidérurgie est une colonne vertébrale sociale en Belgique. Le peuple wallon se sent particulièrement touché, la solidarité est grande : la plupart des wallons et wallonnes ont ou ont eu un métallo ou un mineur dans leur famille. Le 21 février, 40 à 50 000 travailleurs et travailleuses étaient dans les rues de Bruxelles contre les nouvelles mesures de gel des salaires, métallos wallons et flamands en tête.
Pour beaucoup, la coupe est pleine : marre des promenades à Bruxelles et des journées de grève générale « presse-bouton ». Il faut un plan d’action, une grève générale d’ampleur, pour vaincre !