Par AL Alsace
Avec l’obsession omniprésente du retour de la croissance, avec les multiples incantations gouvernementales à la sainte croissance, avec les dizaines de milliards dépensés pour aider les entreprises chéries à « relancer la croissance », il y a bien un certain nombre d’entreprises qui se frottent les mains. Notamment dans le secteur à la mode du « développement durable », où des grandes entreprises comme Monsanto (semences, OGM…) ou Fonroche (géothermie profonde) prévoient d’accroître leurs profits, grâce notamment à l’argent public, le nôtre.
La faim justifie les moyens
Impossible de se sentir à l’aise avec cette entreprise qui fait face à de nombreux procès et scandales, loin d’être tous enterrés : Monsanto a l’habitude d’investir… dans le lobbying et l’achat de ceux qui la gênent. Elle est d’ailleurs parmi les entreprises qui ont le plus investi dans l’exposition universelle de Milan, qui vient de s’ouvrir, avec le thème « Nourrir la planète ».
L’impératif de nourrir une population plus nombreuse lui permet de profiter (et d’influencer) les politiques publiques qui viennent aider la production agricole : elle a par exemple « conseillé » le premier ministre indien qui vient de décider d’autoriser les OGM pour les cultures alimentaires en Inde. Pourtant les cotons OGM de Monsanto occupent déjà 90% des surfaces de coton du pays… et ont provoqué le suicide de 270 000 paysans surendettés pour payer l’entreprise, depuis son arrivée.
Elle s’oppose de plus à l’autonomie des paysans en les maintenant dans sa dépendance, comme en Haïti où sous un couvert humanitaire, elle s’assure un nouveau marché en replantant les sols avec ses semences propres ! En effet les semences que cette entreprise commercialise (comme ses concurrents DuPont Pioneer, Dow AgroSciences et Syngenta) sont l’objet de brevets qui en interdisent le libre emploi, notamment le réensemencement à partir de la récolte antérieure.
De plus, comme elles ne peuvent être correctement utilisées sans les engrais et pesticides que commercialise cette entreprise (duo Round up/soja Round up Ready), Monsanto fait coup double en piégeant ses propres clients. L’organisation institutionnelle de la dépendance des agriculteurs, et notamment des plus pauvres d’entre eux, s’apparente dans de nombreux cas à une forme moderne de colonialisme, ou d’impérialisme privé.
Plus fort que le droit
Avant cela, l’entreprise fabriquait des produits chimiques : Monsanto fournissait le gaz Agent Orange à l’armée américaine pendant la guerre du Vietnam, responsable de la défoliation de dizaines de milliers d’hectares. Les effets perdurent après la fin de la guerre et entraînent cancers et malformations. Le premier procès, sur ce sujet, n’a pas arrêter l’entreprise.
Viennent ensuite les gênants effets de produits de Monsanto au fil du temps : hormones bovines, PCB, Round Up. Ce dernier herbicide rend les plantes résistantes à certains traitements, preuve d’une vue à court terme pour l’environnement. En fait, Monsanto voit le long terme de ses profits, qui dépend de ce que ses produits ne durent pas et qu’on doive sans cesse les racheter.
Les conséquences, Monsanto s’en fout allègrement et l’entreprise ne se gêne pas pour falsifier ses tests en labo, seules expériences acceptées par l’UE pour prouver ses dires (pas de contre-expertise !). C’est d’autant plus grave que les entreprises de semences brevettent tout ce qui existe, réclamant aux producteurs un pourcentage sur les récoltes et enchaînent les procès à l’encontre de ceux qui les contredisent. Pour eux c’est clair : ils sont propriétaires du vivant et sont prêts à exproprier tous les vivants de leur propre vie !
Ce système tend à remplacer l’agriculture traditionnelle vivrière, indépendante et souvent plus écologique par une monoculture conventionnelle (ou même bio !) qui ne les nourrit pas : les paysans pauvres du Brésil produisent à destination de la Chine, elle-même devenue depuis peu importatrice de riz… Une stratégie globale qui accentue l’éloignement entre consommateurs et producteurs au profit des entreprises capitalistes qui en sont les exploiteurs et les intermédiaires.
Faisons germer l’alternative
Les intérêts propres de Monsanto se trouvent donc aux antipodes de l’intérêt général. Elle confisque le bien commun au profit de l’intérêt privé et rejoint en cela les autres capitalistes de l’agro-alimentaire et de la distribution. Aujourd’hui ce que nous voulons, c’est toujours plus d’alimentation saine et propre. Tout cela passe par le contrôle de ce qui est produit et consommé. Les circuits courts, les labels et certifications nous offrent une partie de réponse grâce aux AMAP, coopératives et petits producteurs conscients.
Mais le contrôle généralisé de la production agricole par tous et toutes n’est pas envisageable dans une société capitaliste, tout simplement parce qu’il présuppose que soit mis fin à la propriété privée du sol et des ressources naturelles, qui doivent être considérées comme la propriété inaliénable de toute l’humanité, passée, présente et future, avec un contrôle collectif sur leur usage.
Plutôt que des exploitations productivistes géantes, chargées de nourrir des villes de plus en plus gigantesques, ce sont des petites exploitations qui doivent être installées, au plus proches des consommateurs, y compris aux cœurs des villes. Plutôt que d’agrandir sans cesses les villes, il faut donner aux campagnes les moyens de vivre dignement et les repeupler.
Reprendre le contrôle de notre alimentation, de notre milieu de vie et de notre travail nécessite une lutte aussi bien contre les capitalistes, qui prospèrent grâce à la faim, que contre les autorités politiques qui nous imposent des politiques de gigantisme urbain.
Reprenons en main la production de notre alimentation !
Imposons un contrôle sur l’usage de toutes les ressources naturelles !
Autogestion !
4e journée mondiale contre Monsanto à Bruxelles
Samedi 23 mai à 13h, RDV Eglise Notre Dame du Finistère (à côté de l’entrée de l’Inno) Rue Neuve.