AL Urgence écologiqueLe Sommet mondial sur le climat (Cop21) n’aboutira à rien. Les grands décideurs politiques et économiques qui s’y rencontreront ne peuvent vouloir, à la fois, réduire les émissions de gaz à effet de serre, et « relancer la croissance », leur idée fixe. Pour stopper le réchauffement climatique, il faudra effectivement changer de système. Et donc poser la question qui fâche : la propriété des moyens de production et d’échange.

A l’occasion de la 21e Conférence des Nations Unies sur le climat qui se tiendra dans quelques mois, et qui est censée relancer l’effort international contre l’effet de serre et le réchauffement climatique, gouvernements et capitalistes déploient toute leur énergie à prouver que le système – politique, économique – est capable d’une réforme à la hauteur de l’enjeu : se limiter à un réchauffement de l’atmosphère de 2°C, et ainsi éviter les conséquences les plus dramatiques d’un changement de climat.

Mais pour une partie de la population (et même des ONG qui participent de l’intérieur) les mensonges qu’ils se font à eux-mêmes ne prennent pas. Négociations, fausses solutions, mesures incitatives, tout ce qui veut rester compatible avec le capitalisme ne peut que sonner faux, puisque le capitalisme est l’origine de la crise écologique, comme il est à l’origine des écarts croissants de richesse entre les classes sociales.

Des négociations qui ne changeront rien

Les analyses du brouillon du futur accord de Paris montrent sa faiblesse par rapport aux recommandations des scientifiques en matière de baisse des émissions.

Sur les deux engagements phares qu’il faudrait prendre, le texte ne dit rien : laisser 80 % du pétrole restant dans le sol ; limiter les émissions de gaz à effet de serre (GES) à 44 gigatonnes dès 2025 (soit la moitié des émissions actuelles), 35 en 2050.

Et les derniers raouts politiques qui préfigurent la conférence – G7 de juin 2015, sommet Climat et territoires de juillet – confirment que, sur ce sujet comme sur d’autres, il y a peu à attendre. le fonds international pour l’adaptation climatique et les victimes ne contient qu’un dixième des 100 milliards de dollars promis par les états.

Enfin (mais ce n’est pas une nouveauté puisque c’est dans le code génétique des négociations depuis le protocole de Kyoto) les accords consistent surtout à promouvoir des solutions profitables au capitalisme financiarisé :

  • la poursuite des marchés carbone (autorisant de fait les entreprises à polluer si elles « compensent » par des projets écologiques souvent douteux)
  • les fausses solutions consistant à « valoriser » des écosystèmes en prétendant les protéger (forêts et océans deviennent alors des puits à carbone dont on peut évaluer la valeur, puis sur lesquels on peut spéculer)
  • ou encore la promotion d’« énergies renouvelables » qui ne le sont qu’en apparence (biocarburant, biomasse etc…)

Mobiliser la société, organiser la résistance

La population qui se mobilise a donc bien raison de n’accorder aucune confiance aux négociations de décembre. Mais les revendications, de même que les solutions proposées par les divers mouvements, ne se fondent pas forcément sur un véritable consensus politique.

Avec le climat et les GES comme angle d’attaque, une grosse partie des campagnes citoyennes portent logiquement sur le désinvestissement voire l’abandon des combustibles fossiles (appels issus d’ONG tels l’« épreuve des peuples pour le climat » ou celui plus récent contre « le crime climatique »), ainsi que sur la nécessaire relocalisation de l’économie et de la production, et bien sûr les transformations politiques qui conditionnent ces réajustements.

Mais ce ne sont pas seulement la mondialisation des échanges, ni la concurrence effrénée entre les puissances qui génèrent la crise climatique et plus généralement la crise écologique.

Quant à l’impuissance des États, elle n’est pas seulement due à un déficit de souveraineté sur les multinationales.

Pour nous, c’est le dogme central de la croissance obligatoire qui, mécaniquement, impose à toute activité économique de compresser les coûts, le coût des hommes et celui des ressources naturelles. Changer le système ne signifie donc pas seulement « démondialiser », ni réguler le marché, fût-ce de manière volontariste. Changer le système implique de réellement reprendre le pouvoir de décision, y compris sur les conséquences, et pour cela c’est la propriété des moyens de production qu’il faut reconquérir.

Politiser le débat sans céder aux sirènes du souverainisme

Certains pensent y arriver en se réappropriant des savoir-faire (depuis la production agricole jusqu’à celle de l’énergie), en construisant des économies alternatives à échelle humaine et fondées sur des principes de partage (monnaies locales, amap, fablab…).

Si ces efforts sont significatifs et nourrissent le lien entre dimension sociale et écologique, et s’ils mènent avantageusement une nécessaire bataille culturelle, nous doutons de l’efficacité « de masse » de cette propagation des idées par le fait.

Tant parce que les acteurs capitalistes lorgnent sur l’économie sociale et solidaire (pour s’y convertir parfois, ou pour en faire une soupape de sécurité), que parce que ces initiatives restent parfois restreintes à certaines classes sociales, sans être utile à la grande masse.

Ces efforts sont donc insuffisants contre la source de la crise écologique : le capitalisme. et tant que la survie de la majorité d’entre-nous, et des travailleurs du monde dépend de ce même système, réunir les conditions pour que ça change signifie récupérer la propriété collective d’un certains nombre de choses.

Nous pensons qu’il faut lutter d’arrache-pied pour une écologie radicale ET sociale, loin des solutions de « greenwashing » rabâchées par les gouvernements, les entreprises et les médias :

  • la biomasse à grande échelle n’est pas une solution écologique car elle impose une industrialisation de l’agriculture
  • les agrocarburants ne remplaceront pas le pétrole car ils sont produits avec des pesticides, et les pesticides sont produits avec du pétrole
  • la géothermie profonde met en péril la solidité des sols et utilise les mêmes techniques que l’extraction des gaz de schiste
  • le nucléaire n’est pas une énergie propre : extraction de l’uranium, retraitement et stockage des déchets, accidents…
  • une voiture hybride n’est pas écologique, car elle est très polluante à produire et difficile à recycler.

Toutes ces fausses solutions ont en commun de servir les intérêts des grands groupes industriels.

Face à l’hypocrisie de gouvernements soumis aux intérêts économiques et face aux mensonges de ceux qui s’engraissent en détruisant la planète, les projets alternatifs ne peuvent être qu’une partie de la solution.

On ne changera pas les choses sans affronter directement le mode de production capitaliste et sans proposer un projet de transformation sociale en rupture avec le système actuel. Nous militons pour une société communiste libertaire, débarrassée des intérêts privés dévastateurs et reposant sur la mise en commun et la gestion collective des moyens de production. L’urgence écologique, c’est la sortie du capitalisme.

Commission écologie